Mathématiques, Vidéo : Hélène Morlon - Des mathématiques pour dérouler le film de l'histoire du vivant
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Conférencière : Hélène Morlon, directrice de recherche au CNRS et chef d'équipe à l'institut de biologie de l'École Normale Supérieure.
La diversité du vivant qui nous entoure est fascinante. Dans le contexte actuel de crise de la biodiversité, il est devenu particulièrement important de décrire les lois générales de cette biodiversité et de comprendre les mécanismes écologiques et évolutifs qui sous-tendent ces lois. Des modèles mathématiques aléatoires peuvent être combinés à des données génétiques et fossiles pour "remonter dans le temps" et estimer les vitesses passées de diversification et d'extinction des espèces, leur histoire biogéographique, ou encore l'évolution de leurs gènes et de leurs caractéristiques écologiques et morphologiques.
Dans le cadre de la conférence intitulée "Des mathématiques pour dérouler le film de l'histoire du vivant", Hélène Morlon, éminente directrice de recherche au CNRS et chef d'équipe à l'institut de biologie de l'École Normale Supérieure, explore l'utilisation des mathématiques pour retracer l'évolution de la biodiversité sur Terre. Elle souligne l'incroyable diversité des espèces vivantes, se demandant pourquoi certaines catégories d'espèces sont plus diversifiées que d'autres. Par exemple, les scarabées représentent une part significative des espèces terrestres, tandis que d'autres groupes comme le sénodon, malgré leur longue histoire évolutive, sont représentés par peu d'espèces aujourd'hui.
Hélène Morlon explique que pour comprendre ces différences de diversité, il est crucial de regarder en arrière dans le temps géologique. Le registre fossile offre un aperçu direct de la diversité passée, révélant des changements majeurs à travers les ères, comme les extinctions massives et les périodes de floraison de la diversité. Cependant, le registre fossile ne couvre qu'une fraction de la vie sur Terre, laissant une grande partie de l'histoire évolutive des espèces inconnue. Pour combler ces lacunes, les scientifiques se tournent vers les phylogénies, des arbres évolutifs construits à partir de données génétiques actuelles, permettant d'inférer les relations et l'histoire des espèces vivantes. En utilisant des modèles mathématiques de naissance et de mort (spéciation et extinction), ils peuvent estimer les taux de diversification des espèces au fil du temps. Ces modèles révèlent des tendances comme la diminution des taux de spéciation au cours du temps, potentiellement influencée par des facteurs tels que les changements climatiques et les interactions entre espèces.
Hélène Morlon explore également l'impact des changements environnementaux sur la diversification, suggérant que des périodes plus chaudes pourraient favoriser une spéciation plus rapide due à des mécanismes comme l'augmentation du métabolisme et de la productivité des écosystèmes. Ces hypothèses sont testées à l'aide de données phylogénétiques, avec des modèles qui tiennent compte de l'influence de la température et d'autres facteurs environnementaux sur les taux de diversification.
Elle se penche aussi sur la diversité dans les océans, soulignant les efforts récents pour caractériser la biodiversité marine, notamment à travers l'expédition Tara. L'étude des diatomées, un groupe clé du phytoplancton, montre que les taux de diversification peuvent varier considérablement en fonction des changements environnementaux, sans nécessairement suivre la tendance générale de décroissance observée chez les espèces terrestres.
La conférence se conclut par une discussion sur l'avenir de la recherche en biodiversité, évoquant le potentiel de l'intelligence artificielle pour développer des modèles de diversification plus complexes. Ces avancées pourraient un jour permettre une meilleure compréhension de l'histoire de la vie sur Terre et améliorer nos prédictions sur l'impact des changements climatiques sur la biodiversité future.
Une action soutenue par la Région Normandie.